L'association Mémoire des deux guerres en Sud-ouest, créée en 1996, est riche de
37 adhérents.
Installée depuis 2003 à l'abbaye bénédictine de Saint-Sever-de-Rustan, elle s'est
donné comme mission de sensibiliser le public, en particulier scolaire, aux drames
des deux guerres mondiales par une exposition permanente, des conférences et des
publications. Le fil rouge est l'illustration de l'histoire à travers les parcours
individuels d'enfants du pays. Plusieurs d'entre eux mettent en lumière le sacrifice
de deux générations de combattants d'une guerre à l'autre. L'association est soutenue
par le Conseil général des Hautes-Pyrénées, par l'Office national des Anciens combattants
et par le Souvenir Français. Elle a également signé un partenariat avec Les Archives
départementales qui l'aident, en particulier, à la conservation de ses documents
anciens.
L'exposition « II y a cent ans, les Bigourdans dans la Grande Guerre »
Pour célébrer le centenaire de la Grande Guerre, l'association Mémoire des deux guerres
en Sud-ouest raconte au visiteur les quatre années de ce terrible conflit en présentant
vingt mannequins, vingt parcours d'hommes du pays :
Paul Cyriaque, le tailleur de Marsac. Zouave pendant son service militaire, il est
blessé deux fois pendant la guerre,
Jean Bergeret, le Tarbais, hussard devenu artilleur lorsque la guerre des tranchées
rend inutile la cavalerie,
Henri Bassin, l'enfant adopté devenu capitaine, chevalier de la Légion d'honneur,
mort en 1908,
Arthur Labat, de Pujo, dragon à 18 ans, puis officier de chasseurs à pied, tué à
23 ans en Champagne,
Siméon Larrouyat, de Saint-Lézer, mari de l'institutrice de Villenave-près-Marsac
sous-officier d'artillerie,
Eugène Embrun, de Bazus-Aure, ancien officier de Zouaves, tué à la bataille de Charleroi
en 1914,
Jean-Baptiste Sallaberry, le Basque, blessé sur le Chemin des Dames en septembre
1914, amputé d'un bras,
Karl Peitz, de Ratingenj chasseur d'un bataillon du Wurtemberg, qui fraternise avec
des Français en 1915,
Joseph Durac, le « pépère » de Marsac, tué à Verdun alors qu'il ramassait des blessés.
Il avait 43 ans,
André Sengès, de Marsac, fantassin de la classe 1915, tué en Lorraine à vingt ans,
Auguste Cariac, de Marsac, chanteur et musicien, mobilisé comme clairon, blessé trois
fois,
Charles Saura, de Vidouze, sergent mitrailleur, blessé en 1914, tué au Chemin des
Dames en 1917,
Pierre Mora, le Landais, qui a combattu sur tous les champs de bataille avec le régiment
de Mont-de-Marsan,
Fernand Lafïtte, d'Artagnan, blessé par l'explosion d'une grenade en 1918, amputé
du bras droit,
Prosper Abadie, le légionnaire de Marsac six fois cité pendant la Grande Guerre,
Joseph Fourcade, de Marsac, que sa santé fait classer dans le Service auxiliaire
comme conducteur d'automobile,
Jean-François Lapeyre, de Villenave-près-Marsac, conducteur d'ambulance,
Marcellin Clarac, de Marsac, 20 ans en 1916, combat au Chemin des Dames, en Alsace,
à Verdun, en Italie,
Arbanga Adibi, venu de la lointaine colonie du Haut Sénégal-Niger, tué près de Reims
à l'âge de 22 ans,
Léon Pommiès, le Dacquois qui est devenu aviateur après avoir été de toutes les batailles
de 1914 à 1917 dans l'infanterie.
Beaucoup des soldats présentés dans cette exposition sont originaires de Marsac ou
de Villenave-près-Marsac. Ces garçons nous sont bien connus grâce à Joseph Barrère,
l'instituteur du village, qui a constitué un album contenant de nombreux souvenirs
de ses anciens élèves devenus soldats.
Une exposition temporaire, au cœur de l'abbaye de Saint-Sever-de-Rustan, redonne
vie à ces soldats en cette année de centenaire. Un travail méticuleux de collecte
et de mise en scène mené par l'association Mémoire des deux guerres en Sud-Ouest.
Joseph Durac était le « pépère » de Marsac. Comme beaucoup de ses voisins de ce petit
village au si lourd tribut, il est mort à 43 ans, à Verdun, alors qu'il ramassait
les blessés. André Sengès, fantassin d'une famille voisine, avait tout juste 20 ans
lorsqu'il tomba sous les balles en Lorraine. Il y a aussi Auguste Cariac qui fut
d'abord blessé à la poitrine, puis dont le clairon fut transpercé par une balle à
son retour sur les champs de bataille et dont le tibia, enfin, fut emporté par un
éclat d'obus. Sans oublier Fernand Lafitte, d'Artagnan, amputé du bras droit après
l'explosion d'une grenade ,ou encore Eugène Embrun, de Bazus-Aure, qui fut parmi
les premières victimes de ce drame mondial, en 1914, à Charleroi. « Il est un symbole
de ce carnage, s'étrangle sa fille, présente lors de l'inauguration de cette exposition
événement. Des lieux comme celui-ci réaffirme ce message : Ceux qui vivent sont ceux
qui luttent. »
Français et Allemands - Ils sont donc vingt poilus de Bigorre à reprendre vie grâce
au labeur des bénévoles de l'association Mémoire des deux guerres en Sud-Ouest ,
au cœur de l'abbaye de Saint-Sever-de-Rustan. Un travail de collecte qui s'appuie
sur les archives de Joseph Barrère, ancien instituteur à Marsac, et des familles
de poilus, dont beaucoup étaient présentes lundi lors du vernissage. « Mon père parlait
très peu de tout ça », résume Jacques, le fils de Jean-François Lapeyre, conducteur
ambulancier de Villeneuve-près-Marsac, mobilisé à 18 ans. La famille a conservé comme
un trésor deux photos de ces enfants figés dans l'Histoire. « C'est important de
passer ces messages aux jeunes, note Françoise, la petite-fille. On ne trouve jamais
le temps pour ça. Sans parler de ma grand-mère qui nous interdisait de toucher au
tiroir où se trouvait la balle qui avait blessé mon papi. »
À travers chacun de ces portraits, Dominique Delluc, dont le grand-père a bravé ces
champs de bataille, François Petit et les bénévoles tirent de l'anonymat les noms
qui s'égrènent sur les monuments aux morts, donnant à chacun un visage et l'hommage
qu'il mérite. « Ça parle vraiment aux tripes des enfants comme des grands », décrit
François Petit. « Ces soldats de l'infanterie ont fait tous les champs de bataille
de la Grande Guerre. D'ailleurs, mon grand-père, Léon Pommiès, a croisé sur le chemin
des Dames un chasseur allemand avec qui il a échangé son adresse. Cent ans plus tard,
les deux familles se voient encore. »
Pour sa première visite officielle, la préfète Anne-Gaëlle Baudouin-Clerc n'a pas
caché son émotion : « Vous nous avez bien cueillis à travers toutes ces histoires,
ces paroles si vraies. La guerre a meurtri une génération mais elle reste une mémoire
vivante avec des valeurs qui nous réunissent et que nous devons préserver. » À la
tête du conseil général, qui préside désormais à l'avenir du site de l'abbaye de
Saint-Sever, Michel Pélieu a encouragé chacun à découvrir cette exposition et à être
« des passeurs de mémoire passionnés et humanistes. Je suis très sensible à ces nombreux
témoignages. Les Hautes-Pyrénées sont un département éloigné de la ligne de front,
mais qui a payé son tribut à ce conflit. » Car pour ces vingt frères d'armes enfin
dans la lumière, combien de poilus bigourdans demeurent encore dans l'anonymat…
Jusqu'à la mi-novembre à l'abbaye, ouverte les après-midi. Contact :05.62.96.65.67.
Andy Barréjot