La monographie d’Orincles -
En 1886, la ville de Toulouse décide d'organiser "une exposition internationale sous le patronage de l'Etat" : Tous les instituteurs titulaires sans exception devront envoyer à l'inspection académique les monographies de leur commune...
Ma très faible aptitude pour l'art d'écrire et le très médiocre intérêt que présenterait
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I -
Les contreforts des Angles compris entre les vallées de Lourdes et de Bagnères et
ainsi nommés parce qu'ils comprennent l'ancienne baronnie des Angles, se prolongent
vers le nord par une agglomération de hauteurs dont quelques-
Description physique
La vallée avec ses riantes prairies, ses asiles ombragés, formés la plupart d'arbres
fruitiers aux diverses couleurs donnent au village, au printemps, un coup d'œil merveilleux,
avec ses champs dont les fortes récoltes témoignent d'une grande fertilité ; les
coteaux aux croupes arrondies et à pentes généralement douces, recouvertes de châtaigniers,
de bois taillis, de pâturages -
Roches qui constituent les hauteurs
Le sol de la vallée est un terrain généralement siliceux, argileux en certains points, couvert d'une couche grasse et fertile ; on rencontre même cette couche arable, moins fertile sans doute, à la partie supérieure de la plupart des monticules qui s'élèvent à l'est et à l'ouest. A la base de ces derniers et sur leurs flancs, à une assez faible profondeur, on remarque ici des blocs granitiques mais d'une dureté médiocre, là des bancs de schiste peu durs aussi.
Cours d'eau, etc.
Une rivière d'une certaine importance traverse du S. au N. le territoire d'Orincles : j'ai nommé l'Echez, qui prend naissance aux contreforts des Angles et après un parcours de 42 kilomètres, va mêler ses eaux claires et limpides à celles de l'Adour dans le territoire de la commune de Maubourguet. Il reçoit sur la rive droite, à un kilomètre en amont d'Orincles, un affluent la Geline ; sur la rive gauche, plus en aval, le ruisseau du Paréaguet ; et dans l'intérieur de la commune, un autre ruisseau le Galor, au lit profond, presque à sec une partie de l'année mais dont le courant excessivement rapide charrie, lors des inondations, de très grosses pierres et cause parfois de grands ravages dans le vallon d'où il descend. Grossi ainsi des eaux que lui apporte ces tributaires, ayant d'ailleurs un lit très resserré et une pente fort douce, l'Echez est lui aussi sujet à des débordements annuels qui causent aux propriétaires dans leurs prairies et même quelquefois dans leurs maisons et jardins, des dégâts souvent considérables. Orincles a quelques petits canaux, si du moins l'on peut appeler ainsi des voies d'eau détournées de l'Echez dans le but d'assurer la marche de quatre usines (deux scieries et deux moulins) et qui, après avoir arrosé quelques prairies, retombent dans la rivière qui les alimente. En outre de ces rivières dont les eaux sont potables, Orincles possède sur différents points de son territoire des fontaines naturelles dont les eaux fraîches et limpides désaltèrent les travailleurs des champs pendant les chaleurs de l'été, et aussi un grand nombre de puits qui fournissent aux habitants toute l'eau qu'il leur faut dans leurs habitations.
Altitude, climat, etc.
L'altitude d'Orincles est de 375 m. au-
II -
Le recensement de 1886 accuse un chiffre de 628 individus donnant ainsi une diminution
de 28 habitants sur celui de 1881. Ce résultat ne peut pourtant point être attribué
à un excédant des décès sur les naissances, puisque c'est précisément le contraire
qui se produit depuis plusieurs années. Cette diminution est due au départ de jeunes
gens et de jeunes filles qui, dans l'espoir d'une vie plus facile se sont laissés
entraîner par le mouvement fatal qui amène dans la ville les gens de la campagne.
En somme la population restera à peu près stationnaire, quand bien même les naissances
continueraient à présenter annuellement un excédant sur les décès. Elle est en effet
à son maximum de densité, et le trop-
Divisions en quartiers
Orincles a la plus grande partie de ses maisons groupées sur une faible étendue de
son territoire. Le village proprement dit renferme 106 habitations avec 549 habitants
; il y a encore, disséminés sur tout le territoire, 12 maisons isolées comprenant
79 individus.
Fonctionnaires
La commune est administrée par un maire assisté d'un conseil municipal composé de
12 membres. Comme autres fonctionnaires, il y a un instituteur, une institutrice,
un garde-
Cultes, finances, etc.
La commune, dont les habitants sont catholiques, forme à elle seule une paroisse dirigée par un desservant. Elle fait partie de la perception de Bénac ; elle est aussi desservie par le bureau de poste de cette dernière localité. Son centime a une valeur de 0,162865. Quant à ses revenus ordinaires, ils sont très faibles et ils consistent dans la vente annuelle de quelques produits communaux et dans les produits de l'octroi qui vont sans cesse faiblissant depuis que les vignes ne produisent guère plus.
III -
Les productions d'Orincles sont nombreuses et variées. Toutes les richesses agricoles
poussent à l'envi dans la vallée. Autour des maisons, de beaux jardins potagers,
des vergers où de nombreux pommiers, poiriers, pruniers, pêchers, cerisiers, noyers,
mûrissent au soleil leurs fruits délicieux. Les blés et les prairies naturelles y
sont d'un très bon rapport ; le maïs y prospère fort bien ; la pomme de terre y donne
de beaux produits. On y remarque aussi d'autres espèces végétales ; le lin en assez
grande quantité ; les trèfles, sainfoin et luzerne dont la culture est en progrès.
Les coteaux, ainsi que je l'ai déjà dit, sont tapissés de verts pâturages, de vignobles
attaqués de l'oïdium -
Procédés de culture
La propriété est extrêmement morcelée, aussi les procédés de culture en usage sont
loin d'être parfaits ; pourtant il y a quelques progrès et le laboureur commence
à comprendre que les rendements dépendent, dans une certaine mesure, de la valeur
des procédés employés dans la culture.
Bois et forêts
A vrai dire, la commune n'a pas de véritable forêt : à peine quelques hectares recouverts
de bois taillis et de rares gros arbres, le tout à essence de chêne. Par contre les
châtaigniers sont nombreux et le fruit, la châtaigne, constitue pour la commune un
très important revenu. Sur le bord des eaux se trouvent aussi, et même en assez grande
quantité, l'aulne et le peuplier.
Animaux, troupeaux divers
L'élève du bétail est considérable à Orincles, les habitants, dans le but d'augmenter
le revenu de leurs terres, font un commerce très actif des différents bestiaux, vaches,
veaux, moutons, brebis, agneaux, chevaux, mules, mulets et porcs, et aussi de leurs
produits beurre et fromages.
Chasse et pêche
La chasse est d'une très médiocre importance. Le gibier est même aujourd'hui très
rare et récompenserait assurément très mal celui qui se livrerait à la chasse dans
un but spéculatif : aussi ne compte-
En outre des sources de production ci-
Voies de communication
En dehors des chemins ruraux destinés à l'exploitation des terres, et des chemins vicinaux qui le mettent en communication avec les communes de Paréac, Loucrup et Layrisse, Orincles, qui n'a pas de voie ferrée, est traversée du sud au nord par un chemin de grande communication N°7 qui va rejoindre à 2 Kilom. au sud la route départementale de Bagnères à Lourdes et à 7 Kilom. au nord la route de Tarbes à Lourdes. On trouve sur cette route et de construction assez récente, deux ponts assez peu importants, l'un sur la Geline à 1200 mètres au sud et l'autre sur le ruisseau du Galor dans l'intérieur du village. Quant aux moyens de transport, il n'est guère de propriétaire qui n'ait son break avec son cheval ou son âne ; on trouve aussi quelques voituriers publics qui font les jours de marché le service pour Tarbes, Lourdes et Bagnères.
IV -
L'étymologie probable du mot Orincles est très probablement aurum includere (renferme
de l'or). Ce mot s'écrivait en effet autrefois par AU ; et le ruisseau, la Geline,
passe pour avoir dans des temps forts reculés roulé des paillettes d'or. Je ne connais
aucune tradition, aucune légende qui soit propre à Orincles. Les archives ne contiennent
non plus rien d'intéressant ; et tout me porte à croire que, comme les villages heureux,
Orincles n'a pas d'histoire. C'est à peine si sur les lieux on peut remarquer les
misérables ruines d'un château sur lequel il m'a été absolument impossible de recueillir
le moindre renseignement. Au fond, je m'en réjouis, car je trouve là une heureuse
tendance des habitants à perdre jusqu'au souvenir des tyranneaux de leurs ancêtres.
Moeurs, cultes
Les habitants d'Orincles sont de mœurs généralement bonnes et hospitalières. L'étranger
est toujours sûr de recevoir de leur part un bon accueil. Essentiellement laborieux,
ils mènent une vie assez large, et on remarque chez la plupart d'entre eux cette
gaieté, cette jovialité, cet entrain, cette verve, cette bonne humeur, cette insouciance,
ce mépris du lendemain qu'on ne trouve que dans les populations méridionales. D'un
caractère franc, loyal, ouvert, communicatif, caractère qu'a contribué assurément
à leur donner le négoce auquel ils se livrent, ils semblent ainsi se distinguer des
populations des communes voisines. Ils sont généralement doués d'une intelligence
qui leur permet une certaine culture intellectuelle et qui leur rend accessibles
le progrès, la lumière. Et si les pratiques religieuses antiques sont encore en grand
honneur dans Orincles, il est facile de constater les brèches considérables que l'esprit
moderne a déjà faites, chez les hommes du moins, dans le domaine de la superstition,
de l'intolérance et du fanatisme clérical. Les femmes, il est vrai, continuent à
être réfractaires ; et ce qui est regrettable, c'est que l'influence de l'école semble
s'exercer pour le maintien du statu quo. Néanmoins, en somme, il y a des progrès,
à en juger par les cris de désolation que poussent plus que jamais un certain nombre
de bonnes personnes -
Costumes
Le particularisme même dans les costumes tend à disparaître. Et ces costumes locaux
qui ne manquaient pas d'originalité se trouvent remplacés par ceux qui sont imposés
par la mode, à laquelle aiment tant se conformer les habitants des campagnes, les
femmes surtout.
Monuments, archives, etc.
Les monuments, comme les archives communales, font absolument défaut. Il me serait
donc très difficile de préciser le rôle historique de la commune, si toutefois -
Annexe au titre IV -
Manquent aussi les documents qui pourraient servir à établir l'historique de l'enseignement et des écoles. Vers l'an 1800, il y aurait eu un instituteur, d'une certaine renommée même à cette époque, chez lequel, pendant de longues années sont venus en grand nombres les élèves des communes voisines. Cet instituteur, qui donnait l'enseignement dans sa maison d'habitation, ne recevait pour toute rémunération que des dons en nature (céréales, lin, pommes de terre, etc.). Depuis et jusqu'à vers l'année 1860, se sont succédé trois instituteurs qui semblent avoir laissé l'enseignement dans un état assez primitif. A cette époque, l'enseignement est entré dans une ère de progrès qui a été fort accentué dans ces dernières années, grâce à l'énergique impulsion qui lui a été donnée par le gouvernement de la République, impulsion dont la commune a certainement bénéficié. Je ne crois pas en effet pouvoir être accusé de témérité en affirmant qu'aujourd'hui il est dans un assez bon état et que les parents ont pour principal souci de faire donner à leurs enfants une instruction dont ils apprécient tous les avantages.
Description des écoles
Ce qui est moins consolant, c'est la situation de la commune relativement aux locaux
scolaires. Orincles ne possède qu'un seul immeuble pour l'école de garçons. Cet immeuble
est en outre fort insuffisant si l'on considère que la salle d'école a un volume
de 150 mètres cubes pour une population moyenne de 60 élèves. La maison d'école de
filles qui n'est certainement pas dans de meilleures conditions, est une maison louée,
et le propriétaire peut d'un jour à l'autre l'utiliser pour son usage personnel.
La commune serait alors dans le plus grave embarras, car il serait très difficile,
pour ne pas dire impossible, de trouver une autre salle. De ce chef, la situation
est donc des plus mauvaises et il y a urgence à y apporter une prompte amélioration.
La commune n'a pas de fonds, c'est vrai, mais j'ai la parfaite conviction que les
pères de famille seraient unanimes à s'imposer tous les sacrifices qui pourraient
leur être demandés en vue d'une construction nouvelle.
Fréquentation
La fréquentation est assez régulière, et ce n'est que contraints, que les parents
gardent chez eux leurs enfants qu'ils emploient à la garde du bétail, fort nombreux
d'ailleurs dans la commune.
Etat de l'instruction
Comme je l'ai déjà dit, l'instruction est aujourd'hui dans un bon état ; on ne rencontre
pas, même depuis plusieurs années, ni des conscrits, ni des conjoints absolument
illettrés.
Bibliothèque scolaire
L'école de garçons d'Orincles possède une bibliothèque scolaire et populaire, de
fondation assez récente puisqu'elle a été créée en 1883. J'ose espérer qu'elle donnera
d'excellents résultats, vu le nombre sans cesse croissant des lecteurs. Pour l'année
1886, le nombre de prêts a été de 84 pour 29 volumes.
Traitement des maîtres
L'instituteur et l'institutrice n'ont d'autre traitement que celui que leur fait la loi. On ne doit certes pas s'attendre à une amélioration de la part de la commune qui est pauvre. Comme conclusion de ce que je viens de dire sur l'enseignement, et c'est par là que je vais terminer mon travail, je me permettrai d'émettre un vœu ; celui que l'administration départementale mette la municipalité d'Orincles en demeure de construire une nouvelle maison d'école. Je suis profondément convaincu que M. le Maire, ancien instituteur, homme sincèrement libéral, aimant l'instituteur et l'enseignement, s'exécutera avec la meilleure grâce du monde pour réaliser le désir de l'immense majorité de ses électeurs.
Orincles, le 13 avril 1887.
L'instituteur, Candebat